jeudi 12 septembre 2019

Les usines du CAPITOU et l'enquête publique de 2015


En 2015, l'enquête publique concernant les usines du Capitou est terminée. Mal informée, la population a peu participé. Secrétaire d'une association de protection de l'environnement, je rédige un courrier pour demander la prolongation de l'enquête (le nom de l'association est effacé pour respecter son indépendance par rapport à ma candidature).
Au-delà de la critique de forme et des risques évoqués, ce courrier précise les projets de construction qui densifieront cet espace pour en faire un nouveau quartier.
Cette demande de prolongation adressée au préfet ne sera pas satisfaite.






 le 3 juillet 2015
Monsieur le Préfet du Var
Boulevard du 112ème Régiment d’Infanterie 83000 Toulon
Objet : Installations classées pour la protection de l’environnement - ICPE : Société ECOPOLE - Exploitation d’une centrale d’enrobé et d’une centrale à béton, situées lieu-dit "La Source", zone d’activité du Capitou à Fréjus (83600).
Références : Demande d’autorisation et état de la procédure accessibles par Internet sur :http://www.var.gouv.fr/societe-ecopole-centrale-d-enrobe-et-beton-a-a4805.html

L’analyse du dossier du demandeur, celle du rapport du commissaire enquêteur et la façon dont s’est déroulée l’enquête publique aboutissent à deux constats.
Les préoccupations des habitants n’ont pas été suffisamment prises en compte en raison du faible impact de l’information réglementaire, de l’absence de généralisation d’une information médiatisée destinée à un large public et de l’absence de réunion publique.
Les  dossiers du demandeur et le compte rendu du commissaire enquêteur témoignent d’une  forme de légèreté et d’un parti-pris prenant appui sur des analyses souvent partielles et partiales.
DES DOCUMENTS IMPRECIS QUI MASQUENT LA REALITE AVEC DES ARTIFICES DE LANGAGE.
Le dossier de demande d’autorisation comporte des imprécisions et des insuffisances qui n’ont pas toujours été relevées par le commissaire enquêteur. Ce dernier utilise d’ailleurs, lui aussi, le même procédé dans son rapport. Deux exemples illustrent ce propos.
Premier exemple : l’expression « proximité immédiate » : Elle est utilisée pour minimiser la place des populations dans le périmètre de la zone projetée. Cela permet d’écrire qu’il n’y aurait aucun hébergement à proximité immédiate.
Mais il y a un centre commercial régional, un hôtel et un centre d’affaires installés à 500 mètres, un hôpital pour personnes âgées et une caserne à un kilomètre, quatre écoles, des petits centres commerciaux et de nombreux lotissements à moins de deux kilomètres.
Il n’y aurait aucune structure vouée au tourisme à « proximité immédiate », mais il y a une dizaine de campings dont certains sont de véritables villes accueillant l’été plus de 5000 estivants.
L’ensemble représente 5 000 habitants l’hiver et 40 000 l’été.
Lorsque le rapport évoque les vignes, il ne trouve pas d’appellation protégée à proximité immédiate, mais les vignes de « Cure Béasse », de château Paquette et du Clos des Roses sont à un kilomètre du projet.
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Deuxième exemple : le trafic routier
L’impact sur le trafic est exprimé en nombre de poids lourds et non en nombre de passages (pourtant, les camions arrivent et repartent). Cela permet de diviser l’effectif par deux.
Quand le commissaire enquêteur est bien obligé d’évoquer « un impact relativement important » sur la circulation de la D4, il relativise en disant que le flux des poids lourds sera essentiellement nord- sud et sans gêne importante. Il oublie que pour limiter le péage autoroutier, les poids lourds venant de l’ouest quitteront l’A8 à Puget et emprunteront la D4. Tout comme ceux qui viendront du sud de l’agglomération. D’ailleurs les besoins et zones de destinations des produits ne sont pas justifiés.
Cette route est chargée habituellement et en surcharge l’été. Le projet de plateforme et traitement des déchets verts de la CAVEM à « l’ancienne poudrière » du Puget sur Argens aggravera cette situation.
Les piétons et les cyclistes des campings sont nombreux, beaucoup d’enfants rejoignent leur école à pied et il n’y a ni trottoirs ni pistes cyclables. L’impact ne sera pas « négligeable sur le tourisme », comme il est écrit. Et ce d’autant plus que les riverains ont l’expérience d’un bâchage aléatoire des camions se rendant au centre d’enfouissement.
UNE ENQUETE PARTIELLE
Des documents incomplets oublient de donner des informations essentielles pourtant demandées à l’occasion de l’enquête publique par plusieurs associations, dont ... agréée pour la protection de l’environnement du Var (LR-AR du 25 mars 2015 citée par le rapport mais restée sans suite), et de nombreux habitants.
Les polluants :
Les poussières et les rejets gazeux des centrales à enrobés sont connus et dangereux pour les populations. Quelles seront les quantités de rejets de SO2, de NO2, de benzène, d’éthyl-benzène, de toluène, de benzopyrène de cadmium, de chrome et quel sera leur impact sur la santé des populations sur place, dans un rayon de 500 mètres, de 1 km et au-delà?
Une modélisation a été réalisée à l’aide d’un logiciel mais aucune valeur n’est publiée.
Les eaux superficielles :
Les matières en suspension vont être concentrées par ruissellement ou lors des inondations (les terrains situés à l’est du pôle BTP sont couverts d’eau plusieurs fois par an depuis leur création).
Quel sera l’impact de ces eaux après passage dans les cours d‘eau et arrivée sur les plages de Fréjus ?
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Les vents :
Comment s’effectuera la dispersion sous l’influence des vents dominants venant de l’est, de l’ouest et du sud ?
La faune et la flore :
L’inventaire faunistique et floristique a été réalisé en une seule journée. C’est insuffisant. Il n’a pas été conforté dans la durée pour tenir compte des évolutions liées aux saisons. Le complément d’enquête demandé n’est pas encore disponible et peut réserver de mauvaises surprises.
L’impasse totale est faite sur la présence de la tortue d’Hermann qui occupe pourtant les espaces voisins en grand nombre.
Tout ceci est particulièrement regrettable, alors que l’Autorité environnementale avait conditionné son accord sur cette demande à une meilleure prise en compte, à l’occasion de l’enquête publique, des aspects  concernant particulièrement la Faune et la Flore.
Le site considéré n’est pas en zone Natura 2000 mais il est immédiatement encadré par cinq zones de ce type.
UNE ENQUETE PARTIALE
Le rapport du commissaire enquêteur utilise un double langage.
Très souvent, la forme est respectée. Le commissaire enquêteur dénonce des irrégularités dans le corps de son argumentaire mais n’hésite pas en annuler l’effet dans des conclusions affichant une conformité systématique.
Ainsi a-t-il compté 3 personnes lors des quatre premières permanences organisées en mairie «  mais considère que la population de Fréjus a été suffisamment informée » et qu’il « n’a donc pas jugé nécessaire de demander une prolongation d’enquête ».
Les 57 personnes venues à la dernière permanence, le dernier jour de l’enquête, constituent pour lui une « agitation ». Cette affluence ultime « n’est pas le fruit d’un manque d’information mais plutôt le fait d’une prise de conscience tardive ».
Mais comment prendre conscience quand on n’a pas l’information ?
La pétition avec 350 signatures à la fin de l’enquête publique en compte maintenant près de 2 000.
L’hôpital lui-même, directement concerné, n’a pu réagir qu’en dehors des délais. Comment le commissaire enquêteur explique-t-il que 3 personnes seulement, sur 60 000, se soient rendues aux quatre premières permanences ?

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Le commissaire enquêteur a noté « une certaine faiblesse de l’analyse du biotope » mais a tout de même conclu « que le site est implanté dans une zone industrielle devenue peu propice au développement d’espèces naturelles protégées ».
Pour le commissaire enquêteur, « l’exiguïté et l’inadaptabilité du recoin dévolu à la réception du public lors des permanences en mairie de Fréjus ne permettait pas « de déployer l’ensemble des documents mis à disposition ». Mais il conclut en affirmant que « l’enquête s’est globalement déroulée dans un climat calme et serein et dans le respect des textes en vigueur ».
UNE  INTERROGATION ET UNE REMARQUE : Affichage en voie publique ou privée ?
Malgré nos recherches et nos demandes, il ne nous est pas possible d’être certains que l’extrémité de l’impasse Barbéro, après le dernier rond-point, est bien une voie publique comme l’affirme le commissaire enquêteur. Si tel n’était pas le cas, cela signifierait que les affichages n’étaient pas conformes à la réglementation. De toute façon, que cette route soit  privée ou publique, l’accès était barré et donc parfaitement inaccessible pour un affichage public conforme à la réglementation.
Par ailleurs, l’analyse des documents d’une autre enquête publique en cours portant sur la mise en compatibilité du PLU de Fréjus avec la déclaration de projet concernant une diminution de  100 à 50 mètres par rapport à l’autoroute A8 des distances d’implantation pour le pôle production du Capitou montre que le voisinage immédiat de l’espace qui nous préoccupe fait apparaitre que deux zones d’habitation vont être installées à moins de 500 mètres des usines polluantes projetées.
La première, d’une superficie de 1,1 hectare, est appelée « Centre de Vie ». Elle comprendra, à l’est des usines, des équipements publics, des commerces de proximité et des logements collectifs.La seconde 5 fois plus grande, appelée Pôle habitat du Bonfin, sera installée au nord-est d’ECOPOLE.
L’enquête publique contestée n’a jamais évoqué cet apport important de population à proximité immédiate des usines projetées, de leurs poussières, de leurs polluants chimiques et des trafics de poids lourds augmentés.
CONCLUSION
Ces éléments réunis et l’amplification de la résistance des populations concernées par ce projet nous conduisent à demander une prolongation de l’enquête publique prenant en compte tous les aspects ci-dessus tendant à un refus de l’autorisation d’exploitation demandée. Cette considération  s’appuie sur la jurisprudence du Conseil d’Etat, considérant 5 de l’Arrêt n°371566 du 10 juin 2015 (ECLI :FR :CERJS :2015 :371566.20150610), qui précise : « Considérant que les inexactitudes, omissions ou insuffisances du dossier d'enquête publique ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise que si elles ont eu pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative … ».
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 Restant à votre disposition, nous vous confirmons, Monsieur le Préfet, l’assurance de notre haute considération.

Copies pour information :
-Monsieur le Sous-préfet de Draguignan ;
-Monsieur le Chef de l’Unité Territoriale Var de la DREAL

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