mercredi 15 mars 2023

D'Agricola à la grève des éboueurs

 

La grève des éboueurs, contre le projet de réforme des retraites, laisse les grandes villes envahies par les déchets.

Stéphane Frioux, maître de conférences en histoire contemporaine, nous raconte comment les habitants s'y prenaient pour les gérer au fil du temps.

Il y a 2000 ans, on enterrait les déchets ménagers sans les trier, comme aujourd'hui à Bagnols. 

Il y avait très peu de déchets non organiques. Les quantités étaient moindres, la société de consommation n'était pas passée par-là, et le recyclage se faisait naturellement.

Les fouilles des archéologues de Fréjus ont ainsi permis de mettre à jour les vestiges d'un dépotoir de potiers  en creusant sur la plateforme romaine.

La plupart du temps, on vivait aussi avec les déchets. Dans les ruelles du Moyen-Age, "il y avait des porcs publics pour manger" les restes de nourriture mêlés aux excréments de toutes sortes.

Jusqu'au XIXème siècle, ces immondices servaient d'engrais pour les paysans qui "venaient les chercher avec des charrettes tirées par des chevaux. Ils rejetaient dans les fossés des campagnes ce qui ne les intéressait pas. L'universitaire parle alors d'une " sorte de complémentarité ville-campagne."

A la fin du XIXème, les paysans refusent les déchets, trop envahis par la ferraille, le verre et les boîtes de conserve en fer blanc. "Ils préfèrent les engrais chimiques" apportés jusqu'à eux par le chemin de fer, précise l'historien.

Les villes font alors appel à des entreprises pour gérer la propreté. A Paris, en 1883, le préfet Poubelle met en place des caisses normalisées, sans couvercles, pour faciliter le ramassage.

Pendant la première guerre mondiale, on ajoute un couvercle et on évacue les déchets, toujours en les enterrant. Mais c'est aussi le début de l'incinération.

Le métier d'éboueur est pénible et l'on peine à trouver du personnel pour le ramassage, comme pour faire fonctionner les fours. Ce sont les plus pauvres qui s'y collent ainsi que les populations immigrées.

Aujourd'hui, malgré les automatismes qui allègent l'effort physique, la CGT assure que  ces ouvriers ont "une espérance de vie de 12 à 17 ans de moins que l’ensemble des salariés."

Ce n'est certainement pas pour rien qu'ils sont les premiers à monter au créneau contre la retraite à 64 ans.

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